Publié le 2 mars 2015
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Qualité de vie au travail : horizon bouché ?

Ce que la ministre de la Fonction publique Marylise Lebranchu qualifiait le 4 février d'hypothèse désolante s'est produit : la majorité des syndicats de fonctionnaires a rejeté le 20 février le projet d'accord-cadre sur la qualité de vie au travail dans la Fonction publique. « Compte tenu de l'importance de ce projet », la ministre a décidé « de laisser un délai supplémentaire » jusqu'au mois de septembre « aux organisations syndicales non signataires ». Cet échec augure cependant mal de la suite des négociations sur la réforme de la Fonction publique.

L'accord sur la qualité de vie au travail des fonctionnaires semblait définitivement enterré le vendredi 20 février lorsque la CGT, FO, la FSU et Solidaires ont fait savoir au ministère de la Fonction publique qu'ils ne signeraient pas le protocole d'accord. Un rebondissement s'est toutefois produit le 23 février lorsque Marylise Lebranchu a décidé de prolonger les négociations avec les quatre syndicats réfractaires jusqu'en septembre 2015.

> Lire notre  article  du 15 septembre 2014 sur les négociations

Pour être validé, un accord doit être signé par des syndicats dont les résultats électoraux dans les trois fonctions publiques additionnés sont supérieurs à 50 %. Or, le poids cumulé des syndicats signataires (CFDT : 19,27 % + CFTC : 3,33 % + CFE-CGC : 2,91 % + FAFP : 2,93 % + UNSA : 10,38 % ) est minoritaire (38,82 %) et l'accord sur la qualité de vie au travail est donc rejeté. Quatre syndicats représentant au total 56,4 % des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles de décembre 2014 (CGT : 23, 1 % + FO : 18,6 % + FSU : 7,9 % + Solidaires : 6,8 %) ont en effet refusé de signer l'accord.

« La ministre Marylise Lebranchu regrette que ce projet d'accord ne recueille pas à ce jour la signature de l'ensemble des organisations syndicales. Compte tenu de l'importance de ce projet, la ministre a décidé de laisser un délai supplémentaire, jusqu'au mois de septembre, aux organisations syndicales non signataires » a indiqué dans un communiqué le ministère de la Fonction publique dans la soirée du vendredi 20 février.

Force Ouvrière reproche au projet d'accord-cadre sur la qualité de vie au travail dans la Fonction publique d'être « déconnecté de la réalité au travail » et d'occulter « tous les paramètres négatifs ayant dégradé la qualité de vie au travail ces dernières années ». FO réserve sa critique la plus forte au “ droit d'expression directe des agents ” défendu au contraire par l'UNSA qui y voit « une mesure phare qui marque une nouvelle étape dans l'histoire de la démocratie sociale dans la Fonction publique ». Selon Force Ouvrière, cette mesure est révélatrice d'un accord qui « tend en permanence à une individualisation forte au détriment des garanties collectives ».

> Lire notre article : Avoir voix au chapitre grâce à Lebranchu ?

La CGT Fonction Publique, a, pour sa part, rejeté un accord « qui ne remédie nullement » à la dégradation continue des conditions de travail et aux suppressions d'emploi qui, dans certains secteurs, « interviennent de manière encore plus lourde que sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy ».

Et c'est là sans doute que réside le problème. La CGT, FO, la FSU et Solidaires ne contestent en effet pas globalement l'intérêt et les avancées du projet d'accord-cadre sur les conditions de travail en lui-même. Leur rejet marque davantage leur opposition à la politique du Gouvernement en ce qui concerne la Fonction publique : gel du point d'indice, réduction des enveloppes catégorielles, suppressions de postes dans les ministères jugés non prioritaires.

« Il faudrait que le Gouvernement fasse des avancées concrètes sur ces sujets » déclare Denis Turbet-Delot, délégué général Solidaires Fonction Publique « par exemple en annonçant une hausse généralisée des rémunérations des agents ». Mais cette décision relève de Matignon et de l'Elysée.

En retardant en septembre la signature de l'accord sur la qualité de vie au travail dans la Fonction publique, Marylise Lebranchu semble ainsi avoir l'espoir de disposer d'ici l'automne 2015 de nouvelles marges de manœuvre budgétaires. Mais le problème risque de se poser de nouveau pour chacune des étapes de l'ample réforme de la Fonction publique envisagée par la ministre.

Le rejet de l'accord-cadre sur la qualité de vie au travail « n'a pas d'impact direct sur la poursuite du dialogue social (...) les organisations syndicales [ ayant ] toutes fait connaître leur engagement dans la poursuite de l'agenda social de la Fonction publique et leur participation active aux discussions ouvertes ce premier semestre, notamment sur l'avenir de la Fonction publique et la rénovation des parcours professionnels, des carrières et des rémunérations » a précisé le ministère dans son communiqué du 20 février au soir.

Des discussions, oui, mais pour quels résultats ?

Photo  :  © Mathieu Delmestre – Flickr (sous contrat Creative Commons)