Engagement syndical : faut-il avoir peur ?
On le savait déjà : il ne fait apparemment pas bon pour un(e) attaché(e) de s'afficher en tant que représentant(e) syndical(e) à la Mairie de Paris. Et la difficulté que les syndicats rencontrent actuellement pour que des cadres A figurent sur leurs listes de candidats pour les futurs Comités Techniques des Directions en apporte une nouvelle preuve. C'est que l'administration – du moins dans certaines Directions – y met du sien en arguant de soi-disant vérités qui, on le verra plus loin, ne résistent pas à la compétence des individus.
En près de trente ans d'existence, le Syndicat UNSA des attachés des administrations parisiennes a patiemment listé tous les pseudo-arguments qui sont assénés à toutes celles et tous ceux qui souhaitent exercer des responsabilités au sein de notre syndicat au profit de l'intérêt général du corps. Leur énumération est très instructive :
> « Vous allez vous faire remarquer ! ». Pas facile en effet lorsque l'on siège en qualité de représentant des agents au sein du Comité technique (bientôt ex) paritaire de sa Direction de voter contre un projet de réorganisation, de le critiquer, de le discuter, de l'amender, face à son Directeur. Pas facile non plus lorsque l'on siège en qualité d'élu(e) du personnel à la Commission administrative (toujours) paritaire de s'opposer par exemple à une demande d'accueil en détachement ardemment appuyée par sa Directrice ou son Directeur (puisque l'on sait pertinemment que les candidatures de collègues de qualité n'ont pas été retenues « faute d'avoir le profil demandé ») ou de discuter d'une promotion imposée par la hiérarchie.
> « Vous aurez du mal à changer de poste ! ». La candidature d'un attaché ayant des responsabilités syndicales dans une Direction serait-elle aussi bien perçue que l'intrusion d'un ver dans un fruit ? Cela semble bien être le cas, surtout lorsque le poste vacant est à connotation RH. On peut même parler dans ce cas d'une impossibilité pour la ou le collègue investi(e) d'un mandat d'obtenir le poste en question, la hiérarchie présupposant qu'il utilisera ses dossiers professionnels à des fins syndicales. De nombreux attachés exerçant leurs fonctions à la Direction des ressources humaines hésitent même à adhérer à un syndicat de cadres, de crainte d'être découverts !
> « C'est mauvais pour votre carrière ! » « Un cadre A, ça ne discute pas, ça exécute ! ». Mot d'ordre d'origine militaire figurant aujourd'hui dans la série des dictons dépassés ? Sans doute pas, même s'il n'est plus formulé de manière aussi abrupte.
> « L'UNSA Attachés est un syndicat trop virulent ! » Il est vrai que notre organisation n'a jamais donné dans le style compassé que la technostructure municipale juge être une figure imposée pour toutes celles et tous ceux qui défendent des cadres A. Il est vrai également que notre syndicat essaie toujours de cibler ses analyses et ses critiques sur des faits précis et évite de se lancer dans des déclarations générales qui, au final, ne gênent personne. Il est vrai que la liberté d'informer et de s'exprimer est pour nous une valeur cardinale.
Face à ces diverses affirmations, il est tout d'abord nécessaire de rappeler que le fait d'avoir une activité syndicale (y compris pour un cadre A du secteur public) est un droit fondamental dans une démocratie. Il est également nécessaire de rappeler que, lorsque l'on exerce son mandat syndical de façon responsable (et même s'il est nécessaire d'avoir des épaules solides, les débats étant parfois houleux), les compétences finissent toujours par s'imposer. Ainsi, pour s'en tenir à notre syndicat, un certain nombre de membres du bureau (non délégués permanents) et d'élus paritaires dans les Directions ont été promus au choix dans le corps des administrateurs ou dans le grade d'attaché principal, ou ont réussi sans barrage l'examen de sélection professionnelle pour l'accès au principalat. Et même si, à l'inverse, les temps légendaires (remontant à une trentaine d'années) où les responsables syndicaux bénéficiaient de promotions appréciables (le Pouvoir de l'époque aimant acheter de prétendus adversaires politiques) paraissent à présent très lointains.
On peut également noter que d'autres administrations connaissent des modes de gestion dans le domaine syndical autres que ceux encore pratiqués par la Mairie de Paris et considèrent que le fait pour un cadre A (entre autres) d'avoir consacré quelques années de sa carrière à défendre ses collègues et l'intérêt général des agents publics constitue un plus pour l'administration elle-même. Ces administrations encouragent d'ailleurs souvent les personnes concernées à reprendre des responsabilités au sein des services une fois leur mandat syndical achevé et considèrent leurs anciennes activités de représentants des personnels comme un enrichissement pour l'ensemble du service public.
Tous les espoirs étant permis, souhaitons donc vivement que la Mairie de Paris s'inspire rapidement de ces exemples... et devienne ainsi une administration plus adulte.