Les dirigeant(e)s de la Direction des affaires culturelles de la Mairie de Paris viennent de mettre au point un mode de traitement inédit des affaires difficiles (tels les cas de harcèlement moral et sexuel) : s'asseoir sur le dossier et regarder ailleurs. Au-delà des belles paroles et des propos lénifiants de certains hauts fonctionnaires, un cas pratique bien intéressant et très révélateur illustrant la façon dont la bureaucratie parisienne peut quand elle le veut être autiste et atteindre à coup sûr le degré zéro de la gestion des ressources humaines.
Comme c'est souvent le cas dans les problèmes de harcèlement moral et sexuel, l'affaire est délicate et demande à être traitée avec doigté et intelligence. La hiérarchie de la DAC en a connaissance pendant l'été 2011. Dès le début, le ton est donné : les cadres dirigeants concernés ne font rien, si ce n'est d'enlever à la collègue victime du harcèlement la majeure partie de ses fonctions afin de lui éviter tout contact avec la personne incriminée. Notre collègue attachée se trouve ainsi doublement pénalisée, en tant que victime d'un harcèlement et en tant que cadre A se voyant privée d'une part importante de ses fonctions. L'affaire est bien partie...
Passe l'automne. Notre collègue porte plainte au pénal. La Direction des affaires juridiques est saisie d'une demande de protection fonctionnelle. Le Comité de prévention et d'action contre le harcèlement et la discrimination (CPAHD) de la Mairie de Paris est également saisi par l'attachée concernée et se réunit le 11 janvier 2012. La hiérarchie de la DAC connaît le dossier depuis quatre mois mais n'a toujours pas entrepris la moindre action pour tenter de trouver une solution au problème.
L'avis du CPAHD, transmis à la Directrice des affaires culturelles à la mi-février, est extrêmement clair : les membres du Comité sont unanimes pour qualifier d' intolérables le comportement et l'attitude de l'agent accusé de harcèlement sexuel et moral et demander sa mutation. Le Comité demande également que notre collègue victime de ces agissements et qui a souhaité (on la comprend) quitter son service soit accompagnée avec attention dans sa recherche de poste. Notons au passage que cet avis relève du bon sens et que les mesures préconisées auraient dû être prises dès le début de l'affaire par les dirigeants de la Direction des affaires culturelles s'ils avaient eu un peu de courage.
Réponse de la DAC au CPAHD : le silence.
Notre syndicat contacte alors Mme Laurence Engel, directrice de la DAC, et lui demande, dans une lettre du 2 mars 2012 de donner suite rapidement aux demandes du CPAHD.
Réponse de Mme Engel à notre lettre : le silence.
La présidente du Comité de prévention et d'action contre le harcèlement et la discrimination, Mme Maïté Errecart, par ailleurs adjointe au Maire de Paris chargée des ressources humaines, à qui nous avons adressé copie de notre courrier du 2 mars, contacte de nouveau la Directrice de la DAC, ainsi que le Directeur des ressources humaines, le 19 mars en demandant que l'avis du CPAHD soit mis en œuvre le plus rapidement possible.
Réponse de la Directrice de la DAC à l'adjointe au Maire de Paris : le silence.
Nous en sommes là aujourd'hui et l'on reste confondu devant la persistance dans le déni de la Direction des affaires culturelles. Les cadres dirigeants de cette prestigieuse Direction sont-ils toujours bercés par les paroles de la jolie chanson de Simon et Garfunkel, The Sounds of Silence ? Sont-ils frappés de procrastination aigüe faisant que leurs bonnes intentions visant à régler au mieux ce douloureux dossier voient leur réalisation reportée de jour en jour ? Ont-ils la volonté quelque peu puérile de tenir tête à la fois aux syndicats et à l'adjointe au Maire ? Ou ont-ils plus simplement l'illusion qu'il suffit de rester les bras croisés et de laisser passer le temps pour que les dossiers difficiles trouvent d'eux-mêmes leur solution ? Ce serait une chose bien curieuse pour des cadres dits responsables.
Photo : © Respontour (sous licence Creative Commons)