Publié le 16 janvier 2018
Le « All inclusive » s’imposera-t-il à la Ville ? - PDF

Le « All inclusive » s’imposera-t-il à la Ville ?

Dès qu’il saisit la plume, l’agent·e public·que se trouve confronté·e à un dilemme de taille : doit-il·elle adopter l’écriture inclusive ou se conformer aux instructions du Premier ministre, à savoir s’en tenir aux règles grammaticales et syntaxiques en vigueur ? Instructions d’ailleurs destinées aux administrations de l’État et qu’il est tentant de suivre par facilité.

L’exécutif parisien a, quant à lui, opté pour la pérennisation d’une écriture sans stéréotype de sexe malgré une interpellation des élus Les Républicains lors du Conseil de Paris de décembre dernier.

Une circulaire ambiguë

La circulaire du Premier ministre, paradoxalement, prône l’usage de règles essentielles de l’écriture inclusive : la féminisation des noms de fonctions ainsi que les formules à double flexion, telles que « les Françaises et les Français », formules déjà couramment utilisées dans les communications écrites ou orales des autorités et personnes publiques, usages qui permettent de redonner sa place au féminin.

Qui se souvient de cette énigme des années 70 ?

Un jeune garçon est gravement blessé lors d’un accident dans lequel son père décède. Le chirurgien appelé en urgence pour opérer le garçon est bouleversé en le voyant : « je ne peux pas l’opérer, c’est mon fils ». Comment est-ce possible ?

Rares étaient celles et ceux qui trouvaient la réponse : le chirurgien est la mère du garçon.

Cette énigme montre parfaitement le pouvoir du langage sur nos images mentales, pouvoir que la circulaire reconnait implicitement.

En revanche, elle considère comme ancré dans la langue française le fait que le genre masculin est une forme neutre, oubliant qu’avant le XVIIe siècle les métiers au féminin existent et que l’accord de proximité est pratiqué (c’est-à-dire l'accord avec le mot le plus proche, comme en attestent les textes d’ancien français).

Un enjeu dans le cadre d’une politique d’égalité

Rappelons qu’en juin 2016 la Ville de Paris a signé avec le Haut Conseil à l’égalité femmes hommes une convention d’engagement pour une communication publique sans stéréotype de sexe, qui incite « à prévenir et faire reculer les stéréotypes de sexe dans la communication publique, en interne comme en externe ».

Dans le cadre du plan de sensibilisation à cet enjeu de taille, une formation-action a été initiée afin d’ « imaginer collectivement de nouvelles façons de parler et écrire ». Il s’agit, au-delà de la polémique actuelle sur un sujet loin d’être consensuel, de permettre à chacun·e de participer à l’évolution de la langue.

En effet, une évolution imposée de façon arbitraire risque de diviser ce qui n’est pas le but.

Souhaitons bonne chance aux personnels (vous remarquerez la subtile utilisation d’un mot épicène*!) faisant valoir leur mobilité, surtout ceux tout particulièrement affectés aux taches de rédaction, qui devront s’adapter aux orientations définies par les différents employeurs publics.

Question subsidiaire : les candidat·e·s aux concours administratifs devront-ils·elles adapter leur style, inclusif ou non, à celui de l’autorité organisatrice ?

* mot épicène ou mot englobant : dont la forme ne varie pas entre le masculin et le féminin, ce qui permet d’éviter l’utilisation laborieuse du point médian dont il faudra bien créer le raccourci clavier.